A une époque où l'on accède aisément à plus de 20 chaînes de télévision venant de tous les horizons, un constat s'impose : les programmes polynésiens sont très peu présents. L'Outre-mer sur France Ô fait notamment la part belle aux Antilles. Peu d'images de nos îles réalisées par nous même, peu de témoignages singuliers de nos mœurs et peu de traces spécifiques de nos cultures. Pourtant ce sont ces trois éléments qui demeurent ancrés durablement dans la mémoire du voyageur de passage dans nos eaux.
Pourquoi un tel état de fait ? Tout simplement parce que nous commençons tout juste à produire nos propres documentaires. Les départements d'Outre-mer eux, le font depuis bien longtemps car
ils bénéficient de l'aide des Régions et d’un accès direct aux dispositifs d’'aide du CNC (Centre National de la Cinématographie et de l'Image Animée).
L'Aide à la Production Audiovisuelle et Cinématographique (notre dispositif local d’aide à la production), fort de ses trois années d'existence, a permis la réalisation de plusieurs dizaines
de documentaires et de nombreuse nouvelles productions sont en préparation. C'est à la fois peu … et beaucoup. Peu par rapport à ce qu'il reste à faire et beaucoup par rapport à ce qui se
faisait avant l'APAC… c’est-à-dire presque rien. Des productions locales ont même remporté des prix dans des festivals internationaux de renom (à commencer par le FIFO). Les premiers pas de
la production locale sont donc plus qu’encourageants.
Cette année constitue une année charnière pour le monde de l'audiovisuel polynésien. Depuis trois ans en effet, les points de blocage ont été identifiés et déverrouillés, permettant ainsi aux
projets de production locaux d’avoir accès de plein droit à des dispositifs d’aides financières du CNC. Mais il reste encore à signer la convention liant cet organisme et le Pays.
Cet accord devrait nous permettre de monter nos propres productions, de former nos techniciens, de dynamiser cette industrie en créant des emplois, de générer des flux financiers non
négligeables, et surtout de nous exprimer à travers nos films et nos documentaires. Le plus dur a été fait, à force d’obstination. Il ne reste plus qu’à parapher le document, à Papeete ou à
Paris. Reste encore un dernier souci : l'avenir de l’APAC, pierre angulaire du montage juridique nous permettant d'être éligible au CNC, est des plus incertains, par manque de clairvoyance et
de volonté politique.
A l’heure où 1,8 milliard d’individus (soit près d’un quart de la population mondiale) sont connectés à la « blogosphère » et où les industries culturelles (700 milliards de $ de chiffre
d’affaire annuel) sont en demande permanente de contenus à mettre dans les tuyaux de la toile numérique, il serait incompréhensible, qu’une fois encore, une fois de plus, la Polynésie
française passe à côté de l’opportunité de générer des recettes, d’enrichir son savoir-faire technologique, et surtout d’assurer sa promotion au plan international, autrement que par le biais
d’une énième brochure quadri-chromique posée sur un coin de table... !
Alors qu'attendons-nous pour signer cette convention ?
Jeff BENHAMZA
Président de l’ATPA