Nous avons désormais les preuves que la Région a sacrifié le réseau Gazelle aux intérêts privés et à la spéculation au lieu de développer un véritable service public de télécommunication
performant au service des Réunionnais.
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RAPPEL : Le Conseil Régional a décidé en mai 2003, la réalisation d’un réseau régional mutualisé à haut débit visant à desservir l’ensemble du territoire réunionnais.
Le 22 mai 2007, les élus de la Commission Permanente du Conseil Régional ont désigné le groupement MEDIASERV/ SOGETREL / LD COLLECTIVITES comme gestionnaire du réseau régional à haut débit
Gazelle. -La convention n°20070686 de délégation de service public a été signée et notifiée par la Région, le 25 juillet 2007, au groupement pour une durée de 12 ans. Cette DSP représente un
investissement de l’ordre de 17,9 millions d’euros, subventionné à hauteur de 12,9 millions d’euros par la Région et l'Europe (50% de FEDER). Sur un investissement total de 39 millions d’€, la
Région a investi 28 millions (dont 10 millions de FEDER)
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A la lecture du rapport d’activité 2008 de La Réunion Numérique, il apparaît clairement que la Région n’a pas simplement fait preuve d’une négligence évidente dans le contrôle de la
délégation de service public du réseau "Gazelle" mais qu’elle a également couvert des anomalies graves de gestion de la part du délégataire.
L’opposition régionale, notamment au travers la voix de Thierry Sam-Chit-Chong, n’a eu en effet de cesse depuis début 2009 d’alerter l’exécutif et de réclamer une plus grande transparence dans la
mise en œuvre de cette délégation : une première motion a ainsi été déposée en assemblée plénière en juin 2009, laquelle fut suivie de nombreuses demandes d’information. La Région s’était alors
contentée de répondre que "les auteurs de la motion ont pu être induits en erreur dans l’appréciation de la réalité de la situation du délégataire de service public".
Depuis, les opérateurs locaux ainsi que les associations de consommateurs dénoncent également, ouvertement et par voie de presse, les tarifs proposés pour l’utilisation du réseau Gazelle et
déplorent une situation de tarifs prohibitifs sans rapport avec ceux de l’opérateur historique pour des prestations identiques.
A la suite de ces nombreuses interventions, on aurait pu s’attendre à ce que la collectivité exige enfin du délégataire la présentation de ses comptes et de ses activités pour 2008 et lui impose
rapidement une renégociation des tarifs. Pour des raisons que nous ignorons, ces efforts de clarification n’ont toujours pas abouti.
Finalement le rapport d’activité pour 2008 a été rendu public en février 2010 et à sa lecture plusieurs points n’ont pas manqué d’attirer notre attention :
1° - Il est en effet indiqué que le seul opérateur (Mediaserv) ayant souscrit a l’offre ADSL Grand Public du délégataire disponible depuis novembre 2008, est aussi
actionnaire de la Réunion Numérique ; Là commence une zone d’ombre voire de contre-jour, puisqu’aucun autre opérateur n’a estimé l’offre du délégataire financièrement rentable. Cette situation ne
peut manquer de nourrir un certain nombre d’interrogations.
2° - Au niveau des charges de personnels, il est indiqué que "les frais de personnels sont nuls, la structure n’ayant pas, en 2008, de personnel en propre". Dès lors que
La Réunion Numérique et Mediaserv disposent de personnel commun, ont le même président et sont localisés dans les mêmes bâtiments, cette situation ne peut que donner lieu à une présomption de
confusion d’intérêts.
3° - Enfin, alors qu’il est fait état de retards dans les investissements et le déploiement du réseau que devait effectuer le délégataire, le rapport indique que la trésorerie de
La Réunion numérique est littéralement siphonnée vers la société mère, ce qui signifie que la subvention publique destinée à financer les investissements de La Réunion Numérique a en réalité
davantage servi ses intérêts financiers propres. Le rapport précise en effet que cette remontée de trésorerie en l'occurrence des subventions publiques "a généré des produits financiers au
bénéfice de La Réunion Numérique." Non seulement les subventions n’ont donc pas été utilisées conformément à l’objet pour lequel elles avaient été accordées, mais ce qui est plus grave c'est
qu'elles ont servi de base à un enrichissement d’ordre spéculatif !
L’intervention d’une collectivité en matière numérique doit avoir pour objectif essentiel de limiter les effets d’une situation monopolistique ou quasi-monopolistique et non d’en créer une. Il y
a dans la gestion actuelle de cette délégation un risque réel et important de dérives pouvant entraîner une distorsion de la concurrence : les plus touchés par cette distorsion étant comme
toujours les réunionnais qui paient deux fois plus cher pour un service 20 fois moindre qu’en métropole
Au vu de la situation des communications électroniques à La Réunion et dans l’optique d’aboutir enfin à une véritable Décolonisation Economique de la Réunion, je me réserve donc le droit de
porter ces éléments devant la justice avec, le cas échéant, constitution de partie civile.
Jean-Paul VIRAPOULLE
Sénateur de la REUNION
Source : Zinfos974