"Dès que ça pète un peu fort, c’est connu, la presse accourt. La presse "déor" (ndlr : de l'extérieur) évidemment, qui a braqué ses loupes, cette semaine, sur notre petit caillou en surchauffe temporaire. Et lorsque les messages sont retransmis là-bas, en métropole, c’est la catastrophe habituelle : La Réunion, terre de misère, est en proie à une vraie guerre intestine, tout est détruit, l’espoir est mort, etc, etc. (Bon reconnaissons au passage que nous-mêmes ne sommes pas pour rien dans la surmédiatisation, parfois, de certains événements. Tels sont les affres de la presse quotidienne : on prend du recul, parfois, un peu après-coup).
Alors, sur tous les sites possibles et imaginables, sur tous les médias, du Figaro à la Liberté de l’Est en passant par BFM-TV, RMC ou l’Express, nous avons eu droit à tous les commentaires classiques sur le taux de chômage, la moitié de la population en-dessous du seuil de pauvreté, les prix élevés... Normal, c’est de l’info. Mais nous avons aussi eu notre lot de caricatures, à commencer par l’Express, justement qui, pour illustrer un article, a choisi une photo qui doit remonter à une bonne vingtaine d’années : on y voit des gens à la dernière mode post-seventies marchant devant des Super 5, 205 et autres vieilles Honda. La Réunion, vous savez ? Ce petit territoire qui ressemble tellement à l’Afrique ! Le site du journal Le Monde se porte bien, lui aussi, avec un article bâti à partir de témoignages dont a été extrait le titre croustillant : "A la Réunion, "seuls les expatriés ont encore les moyens de s’en sortir"".
Mais il y a mieux, dans les commentaires des internautes, y compris sur les sites des journaux les plus respectacles. Sur lemonde.fr ou figaro.fr (mais ce doit être pareil ailleurs), on vous conseille de jeter un œil. Vous y lirez que La Réunion fait partie du Pacifique et que, par conséquent, son seul échappatoire économique est le tourisme (!). Vous y verrez aussi l’étendue des connaissances socio-démographiques de ces généreux contributeurs de la pensée, comme celui qui nous conseille de prendre exemple de l’Île de Pâques qui n’a pas survécu à la croissance de sa population. Passons sur les théories toujours passionnantes sur l’indépendance à laquelle notre île et les autres devraient être contraintes, sur la fainéantise du tropicalisé ex-colonial. Passons.
Mais en réalité, le vrai rayon de soleil est survenu avant même les événements de cette semaine, dans un hilarant article publié par le Figaro Madame. Pour être honnête, c’est le site Zinfos974 du camarade Pierrot Dupuy, qui a chopé la perle, mais il ne nous en voudra pas de la rendre publique aussi ici. Il s’agit donc d’un superbe papier touristique sur notre jolie île, signé d’une journaliste qui aligne les idioties en rafales. Intitulé "Cap vert sur La Réunion", il nous y est dit, entre autres, que "Cilaos" signifie "le pays d’où l’on ne revient pas", ce qui fait froid dans le dos (la traduction plus exacte serait : "le pays que l’on ne quitte pas", ce qui, avouez, change tout).
On nous parle aussi d’un fromage appelé "tameka" (sans doute le takamaka), d’une musique appelée "malaya" (à ne pas confondre avec le ségo, danse royale des cours poitevines) et d’un épice appelé "cumbada" (du curcuma, on imagine). Et on nous donne pour seule compagnie de liaison avec la métropole Air Mauritius. Bon, ne cherchez pas l’article en version originale : le Figaro Madame l’a modifié dans le courant de la semaine. Pour fêter ça, allons danser la cumbada à la Plaine-des-Grègues !"
Lu sur ... Clicanoo