« C'est une amie qui a consulté mon site qui m'a prévenu le 29 juillet. J'étais alors à Paris. J'ai vérifié et vu qu'il y avait des trucs en arabe sur mon site, des images choquantes, avec des femmes en sang, et puis il y avait des menaces en anglais et en arabe. »
En fait, sur l'écran, il y a écrit, en arabe littéraire (grand merci à notre traducteur occasionnel, Kader!) : « Ce site a été piraté par le Joker de la mort » .
Mario Loco n'est pas fou. C'est un vendeur de vêtements féminins, qui possède plusieurs magasins. Il est très prisé de celles qui veulent s'habiller coquin. Quand il a créé son site, il y a un an, Mario Loco espérait vendre de la lingerie. La même qu'il propose dans ses boutiques. Il voulait ainsi diversifier ses ventes, propulser sa marque sur le net. Là, ce qui est apparu sur l'écran était rien moins que sympathique : « Je ne vais pas arrêter de te pirater! J'ai effacé tous tes fichiers! Protège ton p.... de site... »
« Il n'a peut être pas pris toutes les précautions qui s'imposaient pour sécuriser son site », prévient Florent Bouvier, le spécialiste en criminalité informatique de la direction interrégionale de la police judiciaire (DIPJ) que nous avons consulté. Toujours est-il que Mario Loco, après avoir vérifié l'information, s'est précipité dans le commissariat de quartier de son arrondissement de résidence, à Paris, rue du Croissant, dans le 2e, pour déposer plainte.
« J'ai été reçu par un fonctionnaire de police auquel j'ai donné des sorties imprimantes de ce qu'il y avait à ce moment-là sur mon site. »
Le procès-verbal fait état d'un bref interrogatoire. « Non, je n'ai aucun soupçon sur l'identité de la personne qui a pu faire cela » , a-t-il répondu.
Un jeu cruel
Il a déposé plainte contre X. Plainte enregistrée, pour un délit qualifié de « menaces en langues étrangères sur internet » et « atteinte aux systèmes automatisés de données informatiques. »
« Ce qui ne veut pas dire grand-chose, affirme le spécialiste de la DIPJ. Il aurait fallu qu'il dépose plainte auprès d'un service spécialisé plutôt qu'auprès d'un commissariat de quartier. Ils ne sont pas équipés pour aller plus loin que l'enregistrement de la plainte. »
Florent Bouvier et la DIPJ sont régulièrement actionnés pour intervenir sur de tels dossiers. Les techniques de hacking sont nombreuses.
« Il y a quelque temps, nous sommes intervenus pour un site de Martinique. Il était victime de mail bombing. » Et d'expliquer : « Il s'agit d'une technique pour faire tomber un site : le saturer en générant des milliers de connections. Un millier de requêtes à la seconde! » , nous dit M. Bouvler. Le site ne peut plus répondre. Il s'éteint pour des raisons de sécurité.
Quelles déductions faut-il en tirer pour le site de Mario Loco : « Il y a des bons et des mauvais hackers. Les bons préviennent que le site est mal sécurisé en y pénétrant et stoppent leurs activités immédiatement. Les mauvais piratent le site. Là, nous avons affaire soit à quelqu'un qui veut nuire à la marque de M. Loco ou alors un étudiant en informatique, dans un pays du Maghreb, à cause des mentions en arabe. Il n'y a pas de message politique, malgré le logo que s'est choisi le hacker, un croissant de lune, deux Kalachnikov AK47 (fusils-mitrailleurs).
Cet étudiant s'amuse. C'est un jeu. C'est sa passion de hacker ainsi des sites mal sécurisés. Les gens comme lui font des dégâts. Le seul remède, c'est de sécuriser le site, et efficacement cette fois. »
En attendant, le site de Mario-Loco ne fonctionne plus.