Raphaël Tronché est un homme qui collectionne les talents. Ancien boxeur d'origine guadeloupéenne, son physique — 1,87 m pour 120 kilos — révèle déjà quelque chose de son palmarès de triple champion de France de boxe anglaise. Et si on le suit chez lui après un rude entraînement, on aura l’agréable surprise de le voir gratter à la guitare une petite mélodie de sa composition. Ainsi, quelque part entre la violence d’un sport où toutes les frappes se concentrent sur le haut du corps, et l’allégresse d’une demi-douzaine d’instruments qu’il a appris seul, Raphaël Tronché semble avoir trouvé son équilibre. Le colosse aux mains agiles dresse le portrait de cet écorché vif qui s’épanouit aujourd'hui, loin des rings, dans la musique.
Petit dernier d’une famille de dix enfants, Raphaël Tronché, natif de Calais, a grandi dans un milieu difficile, entre un père abîmé par la vie et des grands frères braqueurs qui enchaînent les allers-retours en prison. Adolescent, le jeune homme découvre la boxe et la musique grâce à un animateur de quartier.
Dans la fureur de la boxe, Raphaël a pu évacuer sa violence intérieure, tiraillé entre ses démons qui l’incitent à serrer les poings et ce besoin de se délivrer par la musique. Grâce à son talent et sa persévérance, le colosse virtuose sera sacré triple champion de France de boxe dans la catégorie des poids lourds : « La boxe, c’était ma clef pour une street cred. Dans l’enfermement de la vie de quartier, difficile de se dire artiste, d’assumer sa sensibilité », avoue-t-il.
En 2010, son parcours est bouleversé par une tentative d'assassinat lors d’une fusillade. Sept balles tirées dans le dos ont failli lui coûter sa carrière de grand sportif. Il en garde aujourd'hui une cicatrice sur l’omoplate gauche, une balle qui a frôlé son cœur. Il mettra environ un an et demi à remonter sur un ring.
Après plusieurs années de remise en question, loin du ring, ce battant de 1,87 mètre n'est pas pour autant malheureux sans ses gants. À 33 ans, il se lance dans de nouveaux défis sportifs et sociaux, loin des clichés du boxeur excessif.
L’appel du ring — une émotion singulière que seuls les boxeurs peuvent comprendre — résonne encore. En 2022, la caméra du réalisateur Tarik Ben-Ismaïl le suit dans son nouveau combat en kickboxing, face à l’Anglais Daniel Sam, un super lourd de 123 kilos pour 1,97 mètre et légende de cette discipline. Raphaël cherche à combattre sans colère, à délivrer des K.-O. avec art.
Celui qui se définit comme hypersensible cherche aussi son salut dans la transmission. Une semaine après son combat, il organise « Boxe avec les maux », une dictée-barbecue géante pour communiquer aux jeunes de sa ville l’importance du verbe et du savoir.
Ce film inédit relate l’histoire d’un homme qui cherche sa voie, tiraillé entre le besoin de serrer les poings et l’envie de les ouvrir vers plus de musicalité pour ainsi assumer une sensibilité longtemps refoulée. La bande originale de ce documentaire est d'ailleurs signée Raphaël Tronché.
À voir lundi 11 septembre à 18h00 sur La1ere.fr, l'offre numérique Outre-mer de France Télévisions, et sur France 3 à 23h50 dans la case outremer.ledoc